Ignorez les vibrations le long des murs

Ambre Jayne

Tu l’entends ? Dis-moi que tu l’entends, que je ne suis pas la seule à coller mon oreille aux murs et à entendre toutes leurs vibrations le long des couloirs. Mais si, je suis sûre que tu l’as perçu, ce fameux murmure qui t’enseigne qui tu es et comment tu dois être. « Soit toi-même », me disait ma mère. « Non, pas de cette façon », te réponds-t-il.  Ne me dis pas que ne t’es pas au courant ? Il est dans les murs, dans les regards, dans les villes et les esprits. Il est imprimé en grand, sur les affiches le long des trottoirs, il passe en boucle à la radio, à la télévision et surtout dans toutes les musiques que tu écoutes.

Ce murmure. Bien sûr que tu l’entends. Il est à peine audible mais lorsque tu tends l’oreille, lorsque tu l’as discerné, il se fait de plus en plus fort, jusqu’à devenir un hurlement, assourdissant et permanent. Puis, tu te mets à l’écouter : il envahi ton corps et se glisse sous ta peau. Fait attention surtout. Méfie-toi du murmure, il aime se faire passer pour toi. Il imprègne très vite tes cheveux et tes vêtements, comme une mauvaise odeur de tabac froid. Ne le laisse pas entrer chez toi.

Si par mégarde, tu l’as accepté. Si par mégarde, tu l’as laissé entrer, il se met à agir comme un parasite et viens prendre ta place. Il te souffle à l’oreille : « T’es mauvais, bon à rien, tu n’y arriveras jamais. C’est prévu, c’est trop tard, c’est gravé dans les mémoires. » Il déforme tes mots et tes pensées et te fait croire qu’on n’efface pas les ardoises, qu’il n’y a pas de rédemption, pas de pardon. Il te remplacera aux repas de famille, aux anniversaires et lors de tes sorties entre potes. Tu ne te reconnaitras plus dans le miroir. Ton visage aura changé. Tu auras beau toucher tes traits et palper ta peau, c’est fini, ce n’est plus toi. Le murmure, assourdissant et permanent, a pris ta place et puise l’énergie que tu avais en toi. Ne t’y méprends pas, ce n’est pas de ta faute. C’est lui qui vient te voler la vedette, te voler tout ce que tu as construit. Maintenant, tu creuse, tu te creuse au fond de ton lit. Voilà, il t’a mis à terre et maintenant tu encaisse les coups, tu n’essaie même plus de les éviter. Et il crie victoire.

Ne te laisse pas faire, relève-toi putain. Surtout, débat toi. Le plus important n’est pas ce que tu es, mais ce que tu as choisi d’être, alors relève toi. Choisit de te redéfinir de la façon dont tu as besoin d’être. Passionne-toi. Prends toi d’amour pour toi-même, oui, surtout, aime-toi. Lève-toi le matin pour ce lever de soleil, lève-toi pour le sentir chauffer ta peau et animer tes sens, lève-toi pour la rosée du matin, le goût des cerises et l’odeur des pins. Fait ce que tu désires de ton existence ou de ton apparence. N’écoute pas l’opinion des autres et trouve ce qui t’anime, que ça soit par l’amour ou la haine. Bats-toi pour ce que tu aimes et bats-toi pour ceux que tu aimes. 

Éloigne-toi des vibrations le long des murs à l’avenir, elles ne sont bonnes pour personne mais tout le monde en est responsable. La rumeur ne marche pas, elle court. N’essaie pas de la rattraper, tu vas t’essouffler. Laisse-la parcourir les murs, elle finira par disparaitre, je te le promets. 

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