Le Premier Miracle – Gilles Legardinier

Connaissez-vous Gilles Legardinier ? Pour ma part je l’ai découvert il y a quelques 5 ans de cela et depuis ses livres occupent régulièrement ma table de chevet. Pourtant, si l’on me demandait de définir son genre littéraire, je serais bien ennuyée…et pour cause ! Même si ses premières oeuvres sont des thrillers, l’auteur s’est par la suite lancé dans une série de roman dont le thème central est…l’humour. Ce sont de ces romans de plage que nos mères adorent dévorer au soleil, pendant qu’elles surveillent d’un oeil distrait leurs marmots qui s’ébattent dans le sable et jouent avec les vagues ; des romans assez rapidement lus et parfois bien vite oubliés qui n’ont pour but que de nous divertir l’esprit de nos occupations quotidiennes, sans en rajouter outre mesure ; pas de la grande littérature, quoi.

Cependant, si le style d’écriture reste simple, accessible à tous et franchement agréable à lire, il ne faut pas penser que je vous présente là des romans simplistes à l’intrigue vue et revue, et oubliés dans la minute qui suit la lecture de la dernière page. Gilles Legardinier m’a toujours surprise par la construction de ses univers et de ses personnages auxquels on s’attache si facilement. Même s’il faut avouer que la fin n’est pas toujours une surprise, les rebondissements et les détours que prennent les personnages pour y arriver sont eux, toujours inattendus et toujours les bienvenus (du moins du point de vue du lecteur). Cela est dû j’en suis sûre à la richesse de la construction de ses personnages. Legardinier parvient à remplir chacun de ses romans de personnages attachants ayant chacun une histoire singulière, une personnalité unique et leurs propres manières de fonctionner, qui sont décrites avec précision, réalisme et (toujours) humour. Dans un univers qui parfois peut paraître complètement farfelu et aux mécaniques parfois grotesques (que ce soit dans les thrillers ou les romans plus légers), les personnages de cet auteur parviennent toujours à nous toucher, à nous émouvoir, à nous faire ressentir de l’empathie et à nous tenir en haleine de la première à la dernière page.

Gilles Legardinier a le talent de bien manier deux genres : le thriller et l’humour. Si pour ma part j’ai davantage été séduite par l’humour de ses romans « légers » tels que Complètement cramé, Demain j’arrête ou encore Ça peut pas rater, je dois avouer que le suspense de l’une de ses premières oeuvres L’exil des Anges m’a tenue en haleine jusqu’à la fin. Alors, comment ne pas tomber irrémédiablement sous le charme de l’œuvre qui allie les deux : Le Premier miracle ? Ce roman dont je veux vous parler aujourd’hui est un thriller policier mêlant suspense, humour et fantastique (et un peu de nazis, parce que ça fait toujours plaisir).

Nous pouvons suivre dans ce roman les pérégrinations à travers le monde de Benjamin Horwood, historien universitaire, et Karen Holt, agent secret britannique, dans leur course contre la montre, avec comme adversaire une mystérieuse organisation qui souhaiterait reconstituer un obscur et terrifiant évènement survenu durant l’Egypte antique.

Dans ce roman on peut retrouver l’une des mécaniques de Gilles Legardinier qui sont pour moi l’une des sources premières de son humour, et donc sa force : son talent pour associer des personnages aux caractères totalement opposés, et pour les faire se confronter dans des situations désopilantes qui parviennent à nous faire rire tout en révélant davantage les personnages, leur histoire et leur personnalité, les rendant ainsi plus vivants, plus « vrais ». Le duo principal composé de Benjamin Horwood, historien placide dont le sarcasme et la légèreté sont les armes de défense et d’attaque absolues, et de Karen Holt, agent sérieuse et pragmatique aux pieds bien ancrés sur terre, est irrésistible et leurs altercations et prises de bec, parfois puériles, sont souvent les bienvenues dans des situations souvent stressantes.

En effet, la progression de l’intrigue du Premier miracle et la montée en suspense tout au long du roman sont bien menées. A l’instar du placide Benjamin Horwood, on peut parfois se sentir perdu, mais totalement accroché, car trimballé de page en page, d’évènements en évènements, sans pouvoir forcément les relier entre eux mais tout en sentant toutefois le crescendo sourd d’une tension dont on redoute l’éclatement.

On pourrait cependant reprocher à l’auteur de perdre un peu en puissance de suspense à cause de certains côtés trop surréalistes de son univers. Certains retournements de situation sont certes inattendus, mais quelque peu farfelus. Ainsi, j’ai parfois été sortie de l’univers car je me faisais la réflexion que c’était vraiment trop « gros » comme ficelle. A cause de cela, je me suis souvent sentie lever les yeux au ciel, ce qui a cassé la montée en tension. Il ne reste pas moins que lors du « sprint narratif » final, je ne pouvais me résoudre à détourner les yeux du livre, ce qui m’a fait finir le roman vers 4h du matin (comme la quasi-totalité des romans de l’auteur que j’ai pu lire), ce que je ne regrette absolument pas, du reste.

Si comme moi vous appréciez le suspense, surtout lorsqu’il est relevé d’une touche d’humour, je vous conseille vivement de lire Le Premier miracle. Dans le même genre (thriller + humour), je peux également vous conseiller Comme une ombre, du même auteur, qui même s’il est un peu plus banal et attendu en matière de scénario, est tout aussi captivant.

Pour finir, je souhaiterais préciser quelque chose : si les romans de Gilles Legardinier peuvent être qualifiés de « romans de plage » ou de romans « légers », ils ne sont pas pour autant complètement roses dans un pays de bisounours (même les plus portés sur l’humour)… Certaines thématiques abordées peuvent être assez graves, comme les retrouvailles entre un père et sa fille, abandonnée pendant 20 ans ; la crise existentielle d’une femme âgée perdue entre la routine, l’angoisse du néant de la mort, la retraite et l’éloignement de ses enfants ; ou encore la maladie d’une adolescente menant inexorablement à sa mort subie de plein fouet par celle-ci, sa famille et ses amis… J’en suis convaincue, Gilles Legardinier a l’art de manier des sujets aussi lourds et graves que ceux-ci avec humour, sans tomber dans une solennité douloureuse qui pousserait le lecteur à la dépression, et sans non plus traiter le sujet avec une légèreté forcée qui nierait le sérieux de ces situations, réellement vécues par beaucoup trop de personnes. Chacune des histoires racontées par l’auteur est certes un rappel de la souffrance qui rôde parfois dans notre monde, mais également un rappel de l’Espérance qui y règne toujours, et qui nous fait croire inlassablement dans la beauté et les promesses de la vie.

J’espère ainsi vous avoir donné l’envie de découvrir cet auteur qui m’enchante depuis des années, et je vous laisse pour retourner à son dernier roman : Pour un instant d’éternité.

Romane Deplaj

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